Questions soulevées par l'association BARRAGE Nature Environnement lors de la commission de suivi de site (CSS) de l'installation de stockage de déchets non dangereux ALVEOL située à Peyrat-de-Bellac du 18/10/2021.

Ce n'est pas un compte rendu exhaustif, ce document a pour but d'aborder les questions que nous avons mises en avant lors de la CSS d'ALVEOL et qui nous semblent importantes pour l'avenir du site, le respect de l'environnement et du droit de la populations de Bellac et Peyrat-de-Bellac de vivre dans un environnement sain et sans risque pour leur santé.

L'importance de la CSS se retrouve déjà dans sa composition même,  avec ses différents membres :

- un collège " administration" - la Sous-Préfète de Bellac, la DREAL, l'ARS, la DTT

- un collège représentant les collectivités - ville de Bellac, de Peyrat de Bellac, Blond, le conseil départemental

- un collège représentant l'exploitant  - 2 élus du SYDED et 2 représentants de SUEZ

- un collège associations - Barrage Nature Environnement représentant Limousin Nature Environnement, Association pour la sauvegarde de la Gartempe, l'association Nature et Cadre de vie, l'association ARBRE

Si les CSS ont pour but d'être "lieu de débats et de consensus", elles doivent émettre des avis formels, en matière d'extension de sites de traitement de déchets notamment. La circulaire ministérielle de création des CSS a précisé aux préfets les consignes de fonctionnement : ordre du jour, ouverture aux experts, au public et à la presse. Les membres de la commission peuvent "aborder librement tous les sujets relatifs aux intérêts couverts par le code de l'environnement", précise la circulaire. Les CSS doivent être informées de tous les changements notables que l'exploitant envisage d'apporter à son installation, y compris "les modifications non-substantielles".

Intervention préalable de BARRAGE Nature Environnement (BNE)

Le Syded qui exploite le site d'ALVEOL n'a pas respecté les prérogatives de la CSS et les droits des élus des villes concernées, des associations environnementales ou  locales  et des populations concernées du droit à être informées de tous les changements notables que l'exploitant envisage d'apporter à son installation, y compris "les modifications non substantielles".

Le Préfet ou son représentant n'a pas été le garant du respect du rôle et des règles et fonctionnement de la CSS d'ALVEOL.

Il est vrai qu'en fin de réunion de la CSS précédente (1er semestre 2019, alors que les CSS doivent se réunir tous les ans) le Président du SYDED, dans les questions diverses avait annoncé que le SYDED envisageait de confier à une société privée la gestion du site par une délégation de service public.

En  2 ans, sans aucune concertation, information en direction des membres de la CSS :

- la gestion a été confiée au groupe SUEZ

- de nouvels arrêtés préfectoraux ont étés émis, modifiant entre autres :

         - l'allongement de la durée de l'exploitation de 10 ans

         - les caractéristiques des déchets entrants modifiant l'art 25 de l'arrêté préfectoral du 26 juillet 2016 et autorisant  le stockage de déchets biodégradables...

         - changement du processus de fonctionnement , sans étude d'impact (mode bioréacteur : les lixiviats sont réinjectés dans la masse des déchets pour accélérer leur décomposition)

Il s'agit bien là d'un changement notable que l'exploitant a apporté à  l'installation. La préfecture se devait de convoquer en préalable une CSS. ALVEOL relevant du régime de l’autorisation au titre des installations classées pour la protection de l’environnement, la modification substantielle d’exploitation aurait dû impliquer une nouvelle étude d’impact environnemental et sanitaire ainsi qu’une nouvelle enquête publique. Aujourd'hui, nous ne sommes plus en mesure de garantir aux populations de Bellac et Peyrat-de-Bellac qu'il n'y ait pas de risque pour l'environnement et la santé publique.

 

Déroulement de la CSS d'Alvéol

Présentation du bilan d'activité 2020 par le représentant de SUEZ

1ère série de questions de Barrage Nature Environnement 

La présentation du bilan 2020 soit 60 pages de documents et 43 diapositives ne tient aucun compte des années précédentes , aucun comparatif, tout est présenté comme s'il s'agissait d'une nouvelle entreprise.

Effectivement , la 1ère diapositive après les présentations règlementaires concerne le tonnage de déchets stockés en 2020  : 44 400 tonnes


            L'évolution du stockage depuis l'arrivée de SUEZ (2019) est passée sous silence.

Le stockage de déchets sur le site d'Alveol est passé de 25 800 tonnes en 2018 à 44 377 tonnes en 2020, et ce alors que l'année 2020 a été marquée par la crise sanitaire et que le confinement du 17 mars au 10 mai 2020 a impacté le site.

Les besoins de stockage du SYDED et de l'Agglomération de Limoges sont restés stables et se situent, comme le montrent les données fournies par le SYDED, aux alentours de 21300 tonnes :

D'où proviennent les 23 000 tonnes de déchets supplémentaires en 2020, de quelles industries ?

Quels types de déchets? Est-ce pour cela que l'on a modifié l'article 25 de l'Arrêté préfectoral, pour autoriser des déchets  biodégradables , alors que jusqu'à présent seuls pouvaient arriver à ALVEOL des déchets non recyclables et non fermentescibles.

La seule réponse donnée par  SUEZ lors de la CSS :  "nous avons des clients qui ont des déchets, ces déchets correspondent aux critères pour être stockés à ALVEOL"; mais ils n'ont pas été en mesure de donner à la CSS la provenance des 23000 tonnes de déchets supplémentaires.

Les possibilités de stockage autorisé au titre de l'arrêté préfectoral de 2020 à Alvéol Bellac étant de 60 000 tonnes par an, pour SUEZ , qui a des ''clients'', les installations ayant été payées par les fonds publics,  il s'agit d'une excellente opportunité.

Remarques de BNE :

Si SUEZ y trouve son compte, ALVEOL ne correspond plus aux objectifs qui avaient amené à sa création dans le bois du Roy à proximité de Bellac et Peyrat-de-Bellac, à savoir stocker dans des conditions de garanties totales pour la population les déchets non recyclables et non fermentescibles du SYDED et de l'Agglo de Limoges et ce, même si cela devait avoir un coût pour la société.

Aujourd'hui, comme l'a expliqué le Président du Syded, lors de la CSS du 18 octobre : ALVEOL avait un coût, les questions économiques l'ont emporté  en confiant la gestion à Suez ; l'objectif est de rentabiliser la gestion.

Nous sommes obligés de constater que le SYDED, sans réunir la CSS, a bien décidé de changer la finalité d'ALVEOL. Si le SYDED avait le droit juridique de faire cela, en avait-il le droit moral vis-à-vis de la population de Bellac et Peyrat-de-Bellac? Mais dans tous les cas, il se devait de s'assurer de la réunion de la CSS.

En confiant cela au privé, avec cette finalité de rentabiliser, nous n'avons plus la garantie que la nécessité financière ne va pas l'emporter sur l'impact sanitaire.

Est-ce pour cela qu'il n'y a pas eu d'étude d'impact environnemental et sanitaire ainsi qu’une nouvelle enquête publique, qui auraient dû être exigées par la Préfecture lors de l'annonce de la mise en place du nouveau process de fonctionnement ?

Lors de cette CSS  du 18 octobre, nous avons pris acte que SUEZ reconnaissait une multiplication des arrivées de déchets non conformes (diapo 15) :

Lors d'une inspection du 16 mai 2019, la DREAL a constaté : " que la majeure partie des chargements .../... comprenaient des quantités non négligeables de déchets valorisables tels que des papiers/cartons ou du bois"

C'est pour demain autant de sources de pollutions olfactives que de pollution de l'air...

 

2ème partie : les nouveautés sur le site

I ) Mise en place d'un "vapotherm"  en juillet 2020 :

Les déchets stockés dans des casiers sont ensuite recouverts de terre  étanche quand les casiers sont pleins ; les déchets produisent alors du biogaz, et des liquides appelés lixiviats. Ces gaz sont captés puis brûlés dans une torchère à 900 °C qui fonctionne en continu.
Suez a ajouté à ce principe sa technologie « Vapotherm »,  30% des lixiviats récupérés  soit environ 1500 m3 sont traités  chimiquement pour obtenir de l'eau osmosée, qui est vaporisée dans la torchère pour être transformée en vapeur d'eau.

les 70% des lixiviats restants sont traités par nano filtration avant d'être rejetés dans le ruisseau, le Vigneau lorsque son débit le permet.

Le débit du Vigneau, à sec de nombreux mois , est enregistré en continu ; nous avons demandé que soit fourni à la CSS le débit du ruisseau à chaque déversement des lixiviats préalablement traités .

Le procédé peut paraître intéressant, car il diminue le volume des lixiviats déversé dans le ruisseau du Vigneau , mais est-ce suffisant ? et quel impact à la sortie de la torchère...?  

L’analyse des rejets atmosphériques est annuelle : le système de valorisation des lixiviats « Vapotherm » est exploité conformément aux dispositions  de l’AP du 26 juillet 2016. Elle a été effectuée par l’organisme de contrôle SOCOTEC les 7 et 8 décembre 2020. Il est évident que cela ne permet pas d'avoir une idée précise de ce que rejette la torchère dans l'atmosphère.


II ) Exploitation des casiers nouvellement pleins en mode Bioréacteur

Quand une alvéole est pleine de déchets, elle est rendue étanche.

Un  volume important des lixiviats bruts est alors réinjecté dans le massif des déchets stockés. L'objectif est d'augmenter l'apport de micro-organismes et d'humidité, nécessaires à la dégradation (accélérer les processus de pourrissement des déchets, 10-12 ans au lieu de 20-25 ans pour une gestion classique).

Là aussi ce nouveau process est mis en place sans avoir été présenté à la CSS, mise devant le fait accompli.

Une nouvelle fois, rien ne nous permet de garantir que ces nouveaux moyens techniques mis en place ne seront pas sans conséquence pour l'environnement et n'auront aucun impact sur la population avoisinante.

Des odeurs persistantes

Lors de la CSS, les associations locales ont fait état d'odeurs récurrentes, 16 plaintes de riverains ont été recensées en 2020, mises sur le compte des travaux.

Lors de la CSS, le bilan des odeurs est jugé satisfaisant, mélangeant les normes fixées par l'OMS au-delà desquelles il y a un risque pour la santé, et la gêne que peuvent ressentir les riverains.

L’hydrogène sulfuré (H2S) ou l' Ammoniac NH3 provoquent une gêne bien avant d'être dangereux, mais pour autant est-ce acceptable?

 

En résumé

Lors de la  CSS du 18 octobre 2021, nous avons fait longuement part de nos préoccupations :

-  le volume de déchets que traite et s'apprête à traiter Suez sur le site d'Alvéol Bellac, ils veulent atteindre les 60 000 tonnes par an ;

-  l'objectif de Suez qui est de rentabiliser son site et ce que cela implique de rechercher de nouveaux clients, de  nouveaux gisements de déchets au-delà des limites géographiques raisonnables ;

-  le rejet maintenu de lixiviats dans le ruisseau le Vigneau ;

-  le rejet des gaz de la torchère et le système Vapotherm mis en place ;

-  la mise en place d'un système Bioréacteur pour accélérer les processus de pourrissement des déchets et cela sans étude d'impact.

- la persistance de la gêne pour la population créée par les odeurs autour du site.

Nous avons noté que devant nos questions à La CSS, Mme la Sous-Préfète a pris l'engagement de convoquer une nouvelle CSS Alvéol sans attendre le délai d'une année.