Siégeant à la commission de suivi de site de l’incinérateur, cela fait plusieurs années que nous nous étonnons du faible taux de plainte ou de désagréments signalés par les riverains qui transparaissent dans les rapports successifs. Nous avons donc directement interrogé les intéressés. En voici les résultats que nous avons pu porter à la connaissance de la commission de suivi de site qui s'est tenue le 02 mars 2022. Proche de l'incinérateur mais aussi de l'A20, la qualité de vie des riverains est particulièrement atteinte.

Nous avons délimité la zone proche de l’incinérateur suivante :

Nous avons réalisé un questionnaire, imprimé 1000 exemplaires et remis dans les boites à lettres de cette zone par nos bénévoles, pour certains en porte-à-porte. Les riverains impactés pouvaient répondre sous forme numérique ou par renvoi du questionnaire papier.

Le questionnaire a eu un taux de réponse de 5,1% (21 réponses papier et 30 réponses numériques) en plus des informations prélevées en porte-à-porte. Nous jugeons ce taux de réponse satisfaisant en comparaison aux 659 réponses de la dernière enquête déchets réalisée par la Communauté urbaine de Limoges portant sur 105 244 ménages, soit 0,63% de réponses. Nous avons pu constater une grande honnêteté dans les réponses, les riverains nous signalant certaines nuisances en fonction notamment des vents dominants ou de la saison, ou la difficulté de discriminer les sources des poussières.

 

La proximité avec l’incinérateur :

La majorité des répondants habite depuis plus de 10 ans. Ces riverains ont eu à vivre sous les retombées qui ne respectaient pas les normes d’émissions actuelles, qui sont encore appelées  à être réduites. 65% des répondants résident sur la commune de Limoges et les 35% restants sur la commune du Palais-sur-Vienne.

« J'habite depuis 1981 à proximité de l’incinérateur. Une réunion d'information a été tenue avant la construction de l'incinérateur, où nous avons assisté. Le délégué du Maire de l'époque nous a assuré des études d'impacts qui avaient de faites. Malgré notre réticence, l'incinérateur a été construit et il nous a pollué depuis sa création! Nous n'avons jamais été informés de son fonctionnement ni des nuisances qu'il émet. »

« J'étais arrivé chez moi bien avant l'installation de l'incinérateur. On est venu nous demander si nous étions d'accord quant à son installation. J'ai répondu non, personne n'en a tenu compte. Depuis, j'ai développé un cancer prostatique. Pour le reste je pense que cela ne sert à rien de se plaindre car ils n'en feront qu'à leur tête. »

 

Grande méconnaissance et manque d’informations sur l’incinérateur :

Majoritairement, ils ne s’estiment pas correctement informés du fonctionnement de l’incinérateur. Et ils ont raison. Cela peut se confirmer par les réponses données relatives aux tonnages et catégories de déchets admises à l’incinération. Moins de la moitié connaît le tonnage maximal autorisé de 110 000 tonnes par ans. S’ils savent que les ordures ménagères sont incinérées, à peine la moitié savent que les refus de tri et les déchets des collectivités le sont aussi. Deux tiers ignorent que les ordures ménagères de la Creuse, les déchets d’activités économiques, les médicaments périmés et les déchets d’activité de soins à risques infections sont admissibles à l’incinération.

Seulement quatre répondants connaissent l’existence de la commission de suivi de site qui se réunit annuellement, et deux d’entre-eux savent comment accéder aux informations données lors de ces commissions.

« Davantage de transparence sur le fonctionnement de l'incinérateur. Que les gens soient tenus au courant du fonctionnement de l'incinérateur et de l'évolution du matériel et de sa maintenance. »

 

Impacts de l’incinérateur sur le quotidien des riverains :

Les nuisances par ordre de fréquence les plus rapprochées sont les dépôts de suie et les poussières, elles sont perçues majoritairement comme des nuisances fortes à insupportables.

« 1) Problème de dépôt de suie, nettoyage des terrasses qui deviennent noires. 2) De temps en temps bruit infernal de dégazage. 3) De temps en temps odeurs nauséabondes suivant le sens du vent. »

« Noircissement des façades et murets. Sous le vent de Nord-Est, odeurs de brûlé et d'ordures ménagères. »

Puis, viennent à quasi-égalité les bruits de fonctionnement et les odeurs d’ordures ménagères qui sont perçus de modérés à insupportables par plus de la moitié des répondants. Le trafic routier induit est faiblement identifié comme une nuisance fréquente et majoritairement perçu sans ou à faibles nuisances. Par contre le trafic de l’A20 est signalé plusieurs fois comme source de pollution sonore, poussières et odeurs de gazole qui s’ajoutent à celles de l’incinérateur.

« L'été, les portes sont ouvertes et nous riverains sommes obligés de rester à l'intérieur de nos maisons (maux de tête, envie de vomir), impossibilité de recevoir à l'extérieur lorsque la maintenance est faite, ne peut-on pas faire la maintenance l'hiver ! »

« Concernant l'intensité et la fréquence des nuisances liées aux odeurs, elles sont plus intenses à la période printemps/été. »

« Nous sommes à environ 800m de l'incinérateur et la nuisance physico-chimique du panache dépendant du vent dominant nous arrive parfois. Quant au bruit, depuis quelques mois est continu avec une intensité plus ou moins importante. Beaucoup de cancer dans notre zone. »

 

En cas de nuisance subie, l’écrasante majorité (94%) des répondants déclare ne pas savoir comment signaler le problème et avoir renoncé au moins une fois à le faire pour la moitié et avoir renoncé plusieurs fois pour l’autre moitié.

« Un numéro de téléphone pour faire cesser les nuisances olfactives dans la minute qui suit, évidemment il faut qu'un responsable réponde.»

 

Le suivi de la collectivité en charge :

95% souhaiteraient que la collectivité en charge de l’incinérateur recueille leur avis de façon périodique (une fois par an). Un seul riverain déclare avoir été sollicité pour répondre à une enquête de satisfaction dédiée à l’incinérateur.

Quasiment la moitié des riverains ne savent pas si tout est mis en œuvre pour réduire la quantité de déchets à incinérer et 36% estiment que tout n’est fait pour diminuer le tonnage de déchets à incinérer.

Pour finir, la grande majorité ne souhaite pas seulement être tenue informée des nouvelles solutions envisagées pour remplacer l’incinérateur actuel vieillissant, 84% souhaitent au minimum être consultés et 50% estiment qu’ils devraient participer à l’élaboration du cahier des charges des solutions envisageables.

« Être consulté lors de changements importants. » « Prochaine construction loin des habitations. »

« Je souhaite être informé des décisions concernant l'incinérateur à chaque décision par un courrier ou un émail personnalisé. Je souhaite être consulté également. Je souhaite aussi que l'incinérateur soit déplacé hors des habitations. »

« Je souhaiterais qu'un nouvel incinérateur soit construit répondant à des normes écologiques et que celui-ci soit implanté dans une zone non résidentielle. »

« Qu’est-ce-qui est relâché dans les fumées sortant de l’incinérateur ? Quelles-sont les particules toxiques qui en sortent ? Quel-est l’effet sur la santé ? Le nouvel incinérateur va t’il être délocalisé loin des habitations ? »

Lors de la commission de suivi de site a été annoncé qu'un comité de quartier serait réuni et une journée porte ouverte organisée. Ce sont de bonnes initiatives ponctuelles mais il semble que les riverains attendent plus d'informations et de consultations régulières concernant le fonctionnement de l'incinérateur et puissent savoir comment signaler les problèmes qu'ils rencontrent avec cette installation.